L’objectiviste : du consultant à l’entrepreneur

L’objet de cet article est de partager quelques réflexions très personnelles sur le projet entrepreneurial, qui m’anime depuis quelques semaines, pensant notamment à ceux qui seraient titillés par une telle aventure, sans aucune forme de prosélytisme ni dogmatisme, conscient que ce qui fonctionne pour l’un ne fonctionnera pas nécessairement pour l’autre.

Le cabinet Howard Partners vient d’être créé. L’aventure ne fait que commencer. Pourtant, je ne peux m’empêcher de prendre un peu de recul sur ma démarche, tant oser franchir le pas m’a paru pendant longtemps, si inatteignable, impossible, comme l’inaccessible étoile, chantée par Brel. Je me référais, de temps en temps, à ce clin d’œil qui s’amuse à affirmer qu’un entrepreneur est une personne qui se jette de la falaise, et qui, le temps de la chute, construit un avion. On voit bien le sens. Or, entre imaginer et faire, il y a un fossé. L’explication de ce saut dans l’inconnu se trouvait peut-être dans cette capacité à ne pas vouloir tout maîtriser à l’avance et accepter de se lancer. Ce fameux lâcher-prise, dont les réseaux sociaux n’arrêtent pas de nous rabâcher les oreilles. C’est alors que je m’interrogeais sur l’origine de cette « étincelle », une forme d’« inconscience », qui faisait que des hommes ou des femmes se lançaient, sans rien d’autre qu’une intuition ou une vision.

Alors que nous traversons une crise majeure, d’abord sanitaire, probablement économique, possiblement sociale, puis politique, quelle idée saugrenue ?! Quelle mouche m’a piqué pour me lancer dans une telle aventure ? Le referais-je, si j’avais su ? Sans aucun doute, oui. Ce n’est pas de la forfanterie, ni de la méthode Coué, mais bien le résultat d’une démarche personnelle, comme l’aboutissement d’un processus, bien au-delà de sa propre compréhension

Evidemment, il a fallu la rencontre avec un collectif, un petit supplément d’énergie, la rencontre avec des fondateurs dans l’âme, des consultants-entrepreneurs, comme une providence, alors que j’ambitionnais, en mon for intérieur, ce projet depuis tant de temps. C’est alors que l’alignement des planètes se produisit, résultat d’une démarche d’ouverture et non du hasard. La vie me faisait croiser le chemin de personnes animées par le même désir, chacun assumant sa propre singularité, dans un respect mutuel. Ce collectif mettait en lumière des traits de caractère de chaque maillon, des modes de fonctionnement, comprenant alors, par différence, l’objectiviste qui sommeillait en moi. En fait, plusieurs années furent nécessaires pour comprendre mon fonctionnement, la façon dont j’appréhendais les situations, comment je les analysais, comment je me forgeais une conviction, comment je décidais d’agir.

Objectiviste ? je découvrais le mot « objectivisme » au détour de la lecture d’un livre d’Ayn Rand, « La source vive », au travers d’un personnage, Howard Roark, de ses traits de caractère, de ses raisonnements, dans une forme de relation à l’autre très autonome.

Ne jamais se contenter des idées simples !

Certes, Ayn Rand, fondatrice de l’objectivisme, apparaît comme ultra-libérale, inspiratrice de Ronald Reagan ou d’Alan Greenspan, et, depuis quelques mois, de Donald Trump. Faut-il en rajouter à cette image déjà ternie ? Pourquoi donc mettre en avant un tel personnage, dans une société prompte à juger sans savoir et condamner sans comprendre ? Devrait-on s’arrêter à ce raccourci ? Du reste, si un dictateur se mettait à aimer Mozart ou Wagner !, devrions-nous pour autant renier ces talents ? Non bien sûr ! Le monde est bien plus complexe que cela. Les hommes se confrontent bien souvent à leur impuissance, à leur incapacité à maîtriser une situation, en totale conscience de leurs actes. La crise du Covid-19 est, à ce titre, le dernier exemple concret de ces limites, ne pouvant anticiper toutes les conséquences d’un acte isolé en Chine. Elle démontre à quel point, vouloir comprendre, s’interroger, la curiosité, la capacité à remettre en cause, de la manière la plus neutre, la plus factuelle, sont bien les atouts qu’il nous reste pour comprendre notre place, face à la complexité du monde qui nous entoure. C’est la raison pour laquelle j’ai toujours essayé d’aller un plus loin que des grandes idées, des notions dogmatiques de bien et de mal, des croyances, des peurs.

L’autonomie est une rébellion dans le regard des autres

On a tout d’abord amalgamé l’objectivisme avec de l’individualisme, de l’égoïsme. C’était confondre autonomie avec indépendance. La différence est bien réelle. L’autonomie repose sur la capacité à se comprendre, à assumer ce que l’on est, avec ses défauts et ses qualités, puis à écouter les autres, et surtout à chercher à factualiser au maximum les raisonnements, les pensées, les idées. L’indépendance, c’est l’autonomie sans les autres, c’est l’idéal de l’ermite. En fin de compte, l’autonome a compris qu’il avait besoin des autres, pour se rendre utile, les autres n’étant passeulement un support à son développement, à sa quête, mais aussi un miroir. Cette autonomie a d’ailleurs mal été interprétée lors de la traduction du titre du film tiré du roman « La source vive ». En effet, ce film a pour titre français, « Le rebelle », ce qui est, en mon sens, une approximation, probablement culturelle entre une Europe traditionnelle et une Amérique pionnière. Car, au fond, qu’est-ce qu’un rebelle ? C’est un homme qui se développe contre les autres, dans une sorte d’anticonformisme. A y regarder de plus près, l’anticonformisme c’est du conformisme, comme ces adolescents aux attitudes antisociales, qui revendiquent leur propre existence, en seule fonction du regard des autres. Le rebelle a besoin des autres, de leurs idées, pour pouvoir se positionner « contre ». L’autonome n’est pas ce rebelle, car il ne tient pas compte, dans son analyse, dans son raisonnement, de l’avis des autres. Il réfléchit, cherche à décortiquer le factuel de l’émotion et des peurs, il soupèse l’enjeu final, il se forge sa propre conviction, sans se soucier de savoir si elle est en ligne ou pas avec celle des autres. C’est ensuite qu’il mesure les écarts, les perceptions, et peut donc réfléchir sur les leviers à mettre en œuvre pour engager un changement. Que la dérangeante liberté de l’autonome soit dénommée rébellion, n’est qu’une question de jugement et de regard des autres.

L’autonomie, indissociablement objectiviste

Ainsi, l’autonome garde une totale liberté dans l’analyse du monde dans lequel il vit. Il cultive le doute et le questionnement, il remet en cause les dogmes, les idées préconçues, surtout les évidentes, il cherche à se dépasser et éliminer les peurs en écartant le « on a toujours fait comme ça ! ». Il n’occulte évidemment pas les peurs, les émotions. Il sait bien que tout le monde a besoin de croyances pour dépasser ses propres peurs. Tout en cultivant le doute, il sépare le factuel de l’émotion, l’objectivité de la subjectivité.

L’objectivisme serait donc cette ferme volonté de comprendre le monde, les situations, par une analyse des faits, et seulement des faits. L’émotion, les sentiments, font évidemment partie intégrante du processus de décision et expliquent souvent les actes. Mais, ils doivent rester à leur place, sans venir empiéter sur l’analyse des faits. L’objectivisme assume cette forme de liberté de penser et d’être, faisant face à ses propres limites, ses peurs. C’est une résistance, celle d’être soi, de la manière la plus authentique et la plus sincère, sans se soucier du jugement des autres. Il est donc assez naturel que l’objectiviste rencontre sur son chemin, des réactions négatives de personnes ne comprenant pas cette liberté, qu’ils assimileront soit à de l’inconscience, partant du principe que les risques auraient été sous-estimés, soit à de l’indépendance, du fait de pensées trop éloignées de ce qui se fait habituellement. C’est pourquoi un « objectiviste », qui ne peut se renier, ne peut qu’accepter ces réactions, puisqu’en respectant la diversité des autres il renonce naturellement à nier leurs croyances. Ainsi, l’objectiviste n’est pas un prosélytiste, ni un gourou détenteur de La vérité. Il cherche plutôt à partager son raisonnement, les différentes étapes de son analyse, afin justement de lancer le débat, d’améliorer l’argumentaire, voire de changer lui-même d’avis, mais uniquement en s’appuyant sur des faits et non sur les peurs ou limitations des autres.

Certes, nier les peurs, c’est le plus souvent s’opposer aux autres. En effet, les peurs, qui nourrissent des croyances pour les combattre, sont consubstantielles de ce que nous sommes, de nos êtres. Ainsi, nier les peurs des autres peut naturellement être interprété comme le reniement même de la personne. Si mes peurs ne sont pas comprises, alors je ne suis pas compris, je ne suis pas aimé.

Comme une évidence !

Comprendre l’objectiviste que j’étais et que je suis m’a pris longtemps. Le métier de consultant que j’ai choisi n’est évidemment pas un hasard, tant j’aime comprendre les situations complexes, me projeter dans une amélioration continue de tout système, argumenter, confronter des idées. N’est-ce pas ce que les clients attendent des consultants ? Cette capacité à analyser des faits et proposer des solutions, tout en essayant de mettre en lumière des freins à la transformation, parfois d’ordre émotionnel, pour finalement faire prendre conscience à chacun de ses propres limites, de ses peurs, pour mieux les dépasser ?

Animé par cette volonté d’amélioration, j’ai aussi voulu changer mon propre métier, comme consultant de consultants, l’enseignant auprès des étudiants de l’ESCP depuis maintenant 15 ans. Comme tout métier, les organisations, les processus se sont construits par sédimentation. Vouloir revisiter le métier par une analyse factuelle des pratiques, en décortiquant les faits, les objectifs recherchés, des émotions ou des peurs, m’a animé pendant plusieurs années, en me nourrissant de mon parcours au sein de différentes structures de cabinet, avec leurs propres cultures, leurs propres histoires. Ce travail d’analyse sur le métier de consultant et des cabinets m’a permis, par exemple, d’imaginer de nouveaux principes RH, de nouvelles offres, un positionnement de la proposition de valeurs plus affirmé.

Après la réflexion, l’action devenait une évidence. Et, pour ne pas renier mes valeurs, je devais prendre le risque de l’entrepreneuriat,seul moyen de pouvoir mettre cette actionen musique, sans devoir jouer avec les enjeux politiques au sein de structures déjà établies. Se lancer devenait ainsi le meilleur moyen, le plus efficace pour initier une dynamique de changement, tout en gardant une humilité, prêt à adapter le modèle, s’il s’avérait inopportun.

En synthèse, je retiendrais cinq idées majeures, points de repère de ma démarche :

  1. On ne convainc jamais personne. On ne convainc que soi-même.
  2. La rationalité n’est qu’un subterfuge pour essayer de contenir ses propres peurs.
  3. Le courage n’existe que dans le regard de l’autre.
  4. Résister, ce n’est pas être contre, mais juste être soi, aligné avec ses valeurs, debout et autonome.
  5. La liberté, ne serait-ce finalement plus avoir de choix ?

On ne convainc jamais personne. On ne convainc que soi-même.

A quoi sert de parler ou d’écrire, alors que l’on sait que nous n’arrivons jamais à convaincre l’autre ? Certes, on peut débattre d’un fait, d’une analyse, d’un point de vue. Or, quand on touche à la propre perception, à l’émotion, on entre dans le « sanctum sanctorum » d’un être, ses croyances, sa façon de voir la vie, son expérience. Alors, vouloir affirmer sa façon de considérer la vie, n’est-ce pas déjà prétentieux ? De quel droit penserais-je détenir la vérité ? L’autre a bien le droit d’avoir sa propre pensée. Et, comment d’ailleurs, se forge-t-on sa propre pensée ? Par son expérience de vie, par son éducation, par les rencontres, par les échecs. Comme chacun a sa propre expérience de vie, chacun développe son schéma de pensée ! La plupart des problèmes de relations humaines commencent d’ailleurs, quand l’un pense mieux penser que l’autre, veut convaincre, en instaurant d’ailleurs une forme de pouvoir, de domination, de celui qui penserait bien face à celui qui penserait mal.

Débattre, parler, écrire, transmettre, est-ce donc vraiment nécessaire ? Vous seriez bien en droit de me dire (ou écrire), là maintenant, à quoi ça sert ? Pourquoi ? En fait, je pense à ceux qui aimeraient se lancer, ou je repense à ce que je pensais, il y a encore quelques temps, pensées qui me bloquaient, et je ne peux m’empêcher d’essayer de retranscrire ces différentes étapes qui m’ont permis de franchir ce pas. Juste au cas où cela puisse inspirer, déclencher des vocations …

La rationalité n’est qu’un subterfuge pour essayer de contenir ses propres peurs.

Je me suis toujours interrogé sur le processus préalable à toute décision. Les individus cherchent à rationnaliser une décision, c’est-à-dire à construire un mécanisme intellectuel pour soupeser les différentes options qui se présentent avant une décision et, parfois, se protéger des conséquences éventuelles d’un échec. Ces mécanismes se fondent sur l’expérience, la transmission, la culture, le tout afin d’analyser une réalité.

Mais laquelle ? La question se pose car personne ne peut maîtriser l’ensemble de la réalité… tout au plus une partie. Face à cette limitation, nous avons développé des réflexes de maîtrise des risques, des mécanismes intellectuels, visant à essayer d’anticiper le futur. Pour des décisions simples, l’expérience suffit. Par exemple : il ne faut pas mettre sa main dans le feu au risque de se brûler. Mais, qu’en est-il des décisions complexes ?C’est là que le principe de rationalité limitée, étudiée par le sociologue Herbert Simon, prend tout son sens. Face à un choix, l’individu s’appuie sur une démarche rationnelle en essayant de prendre en compte des données. Le problème de cette approche est qu’il est aujourd’hui impossible d’intégrer l’ensemble des informations d’un système complexe, qui, de plus, se déforme dans le temps. Dès lors, comment appréhender l’ensemble des impacts de tel choix ou de telle décision, face à l’ensemble des interconnections, a fortiori dans le temps, nous rappelant le syndrome du battement d’ailes du papillon en Asie ? Les modèles mathématiques, l’intelligence artificielle visent justement à essayer d’embrasser l’ensemble de ces données et de déterminer le futur, via des scénarios possibles, c’est-à-dire les conséquences d’un choix ou d’un acte. Quoi qu’il en soit, même si ce sont des millions, voire des milliards de données, qui peuvent être dorénavant appréhendées, il sera, à l’évidence, toujours impossible de définir le futur avec exactitude. Prendre conscience des incertitudes comme des sources de vie !

Le libre arbitre mériterait même d’être questionné, car comment considérer que l’on décide vraiment sans avoir la pleine connaissance des conséquences de ses choix ? La culture occidentale oppose au « mektoub » oriental, la nécessaire responsabilité de chacun, avec en sous-jacent la culpabilité de l’échec. On ne peut pas se réfugier derrière un destin qui serait déjà écrit, et se soustraire à ses responsabilités. Pourtant, une voie existe entre considérer que l’on ne maîtrise pas l’ensemble des conséquences de ses actes, tout en assumant sa responsabilité, avec philosophie, avec humilité. C’est savoir accepter son parcours de vie, en étant responsable, mais pas coupable. Doit-on toujours chercher à tout contrôler et maîtriser ?

Le courage n’existe que dans le regard de l’autre.

Jamais l’individu qui agit ne se qualifiera lui-même de courageux. Il ne fait que suivre son instinct, mû par un feu intérieur, une « source vive ». En revanche, l’autre, le spectateur, impressionné par une action que son champ de pensées, sa culture, ses peurs, l’empêcheraient d’engager, dira que c’est bien là du courage. Quand on visite le mémorial des fusillés de la résistance sur le Mont Valérien, on ne peut qu’être subjugué par les témoignages de ces résistants ou otages. Maurice Feld, apprenti mécanicien de vingt ans, fusillé en août 1942, écrivait : « Maintenant, je meurs la tête droite et avec le sourire. On ne meurt, vois-tu, qu’une fois ». L’ethnologue Boris Vildé, membre du réseau du Musée de l’homme, quant à lui, a écrit : « Il ne faut pas que ma mort soit un prétexte à une haine contre l’Allemagne. J’avais agi pour la France, mais non contre les Allemands. Ils font leur devoir comme nous avons fait le nôtre. Qu’on rende justice à notre souvenir après la guerre, cela suffit. » Parmi ces nombreux écrits, j’ai aussi retenu : « Ce sont les Français qui me livrent, mais je crie « Vive la France », les Allemands qui m’exécutent et je crie « Vive le peuple allemand et l’Allemagne de demain ! » », mots tirés d’une lettre à ses parents, de Guido Brancadoro, un mineur d’origine italienne. Et bien entendu, je ne compare pas ces actes héroïques à toute décision engagée par un cadre d’une grande institution.

Qu’est-ce qui a poussé ces hommes ou ces femmes, à se dépasser, à dépasser leur condition humaine, leur fragilité physique, à agir, malgré les risques ? Est-ce la haine de l’autre, la jalousie ou la vengeance ? Est-ce l’attente d’être reconnu ? Ou bien est-ce plutôt l’amour ? L’amour de soi, librement, puis des autres, de l’humanité, sans attendre quelque chose en retour. Juste être en paix avec soi-même, s’accepter, accepter ses bassesses, cultiver ses qualités, ses dons, se faire confiance, comprendre que personne ne détient une quelconque vérité, accepter l’autre tel qu’il est, ne pas le juger. Accepter la vie, avec ses malheurs et ses bonheurs, et essayer, à chaque fois, d’en tirer le meilleur pour soi, d’apprendre sur soi, de ses douleurs, de ses bonheurs, de ses frustrations, pour les dépasser, les combattre. Bref, agir pour soi sans égards pour les mots ou le regard des autres.

Résister, ce n’est pas être contre, mais juste être soi, aligné avec ses valeurs, debout et autonome.

La plupart des relations humaines sont fondées sur un rapport de domination, se traduisant par un dominant et un dominé. Ce peut être même très subtil. Par exemple, du moment où vous essayez d’anticiper la réaction de l’autre, la relation perd de son authenticité, vous positionnant, d’une certaine façon, dans le rôle du « dominé ». Dans une relation d’égalité, sans vouloir asseoir une quelconque domination, au lieu de réfléchir à ce que l’autre pourrait penser, juste partager ce que l’on vit, se laisser porter par ses propres choix, tout en assumant sa responsabilité.

Or, apprendre à résister, ce n’est pas se mettre dans une posture contre les autres, mais pour soi. Être fier de ce que l’on est, vouloir changer soi, puis le monde, juste faire sa part, comme le colibri de Pierre Rabhi, et comprendre alors son utilité, sa raison d’être, comme nous l’indique Saint-Exupéry. « Quand tu donnes … » Résister, c’est juste être soi. Et, ceux qui pourraient mal le prendre, qui ne l’admettraient pas, car assumer cette liberté n’est pas toujours chose admise et comprise, qu’ils s’interrogent pourquoi ils sont tant dérangés, du moment où le respect de l’autre est là, c’est-à-dire respecter son statut d’égalité, la condition d’être humain, ni au-dessus, ni au-dessous. Cette façon d’appréhender la relation à l’autre est compliquée dans une société, dans l’entreprise, où la compétition, enseignée dès le plus jeune âge, fait rage, chacun cherchant à être le premier. N’est-ce finalement pas illusoire de chercher une performance vis-à-vis des autres ? La clé, ne serait-elle pas juste l’excellence pour soi, pour sa fierté de s’accomplir.

La liberté, n’est-ce pas ne plus avoir de choix ?

Cherchant à surmonter les peurs, maîtriser les risques et les peurs, on pourra souvent réfléchir à des solutions de repli, à une solution au cas où. Conscient que l’on ne peut tout maîtriser, seules les intuitions peuvent montrer le chemin à parcourir, accompagner ses choix.

La question n’est certainement pas ne plus avoir d’option possible et d’être obligé de faire un choix par défaut, finalement contraint. La question est juste d’être certain, comme une évidence, comme si, d’ailleurs, toutes les décisions prises et le chemin parcouru venaient confirmer la position d’aujourd’hui et cette décision. En fait, il s’agit de ne plus avoir le choix, tout en étant, pour autant, conscient de multiples options pour rebondir. Ne plus vouloir se renier, tout comme ses valeurs, sa façon d’être, se traduit par des choix.

Pour ma part, je décide de me lancer à l’aventure, conscient évidemment de l’incertitude de l’avenir, du succès ou de l’échec. Où sont passées les peurs ? Elles restent là, tapies en moi. Je ne me crois pas inconscient, tant je mesure la hauteur de la marche à franchir. Je suis, en revanche, porté par l’intime conviction que, suivant ce chemin, je ne peux que me réaliser, m’accomplir. Vais-je réussir ? Je ne sais pas, mais je pense, pour citer Nelson Mandela, que « soit je gagne, soit j’apprends. » Finalement, convaincu alors de ne plus avoir de choix, oubliant des raisonnements limités, je trouve enfin ma liberté et j’agis. J’apprends à assumer la complexité du monde, ne cherchant plus à vouloir tout maîtriser, écoutant mes intuitions, apprenant à résister chaque jour.

Seule l’action compte.

 

Publié le 4 juin 2020